Propos d’ouvrier(e)s sans-papiers sur la situation actuelle :

 Il y a beaucoup d’inquiétude. On entend beaucoup de gens qui se demandent « Dans quel pays on vit ? Qu’est-ce qui nous arrive ? » Pour moi, « Qu’est-ce qui se passe dans le pays ? », c’est la question, et il faut que tout le monde réfléchisse sur le pays, sur quel pays on veut.

 Moi je dis aux gens qui manifestent contre le CPE : « Vous avez laissé le gouvernement nous obliger à travailler sans aucun droit, ni retraite, ni sécu, ni chômage, vous l’avez laissé nous persécuter avec les contrôles, les arrestations, les expulsions, et maintenant, c’est votre tour. »
La politique du gouvernement touche tout le monde, elle est contre les ouvriers, elle est contre les gens. On peut pas demander le droit pour les uns et pas pour les autres.

 On partage le même pays. Eux, ils viennent de subir, et c’est dur pour eux, mais c’est le silence de tous qui a amené ça. Ca fait longtemps que le pays va mal, il faut en prendre conscience, et réagir si on ne veut pas subir plus encore.

- En fait on partage les problèmes, mais pas les droits. Il faut aussi réfléchir là-dessus, est-ce que c’est normal ?

 Il faut agir avant que ça touche tout le monde, s’inquiéter de ce qui se passe dans son pays. Il faut arrêter de penser « C’est pas mon problème, ça ne me regarde pas. » et s’occuper un peu des autres gens. Par exemple, la loi Sarkozy 2 c’est une loi terrible pour tous ceux qui vivent en France. On va tous avoir la dictature, la police toute puissante. Il n’y aura plus vraiment de droit, c’est les fonctionnaires qui décideront si tu dois avoir les papiers, même pour ceux qui sont en règle. Là encore, c’est une nouvelle règle qui finira par toucher tout le monde.

 Toutes ces lois, c’est pas pour construire le pays, c’est pour diviser les gens. C’est aux gens à ne pas se laisser faire, à ne pas baisser les bras.

 Les gens sont très nombreux, mais le gouvernement ne veut pas les écouter, il ne tient pas compte d’eux, de ce qu’ils pensent. Beaucoup ne comprennent pas, et se demandent quoi faire.
Nous on connaît ça, on sait que le gouvernement écoute ceux qui parlent pour diviser et déchirer, et pas ceux qui parlent pour tout le monde.

Nous, les ouvriers sans-papiers du Rassemblement, on parle pour tout le monde, on demande les droits du travail pour tous, dès le jour de l’embauche. C’est plus que les papiers, c’est le respect de l’ouvrier.
Le gouvernement nous connaît, il sait qu’on travaille, et au lieu de nous donner les droits, il nous envoie la police. Mais on se bat, pas un jour, pas un mois, pendant des années. Comme ça, en attendant les papiers, on gagne de la liberté pour travailler, se déplacer, envoyer les enfants à l’école, se soigner… on gagne de la confiance et on est toujours là.

Toulouse, le 02/03/2006